Aventures en terres inconnues

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    Svetna - Survivante

    Bannor
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    Svetna - Survivante Empty Svetna - Survivante

    Message par Bannor Dim 7 Juin - 15:21

    Svetna - Survivante 50e004bc03561466f5b01b07ba5c495d

    La première chose que ressent Svetna est une douleur à la nuque. Elle grimace de douleur en se réveillant, le corps endolori d’une position trop précaire. Svetna sent le contact rugueux d’un plancher de bois sous elle, un plancher perpétuellement en mouvement. Sa tête lui fait mal. Elle cherche une prise pour pouvoir se redresser. Quand elle en trouve enfin une, le contact est froid et métallique. Il lui faut quelques minutes pour reprendre totalement ses esprits et découvrir avec effarement qu’elle est dans un chariot et que ce à quoi elle s’est cramponné est un des barreaux de la cage qui la garde enfermée, ainsi que deux autres prisonniers, un homme corpulent et une gamine qu’elle reconnait à son rictus rageur.

    Cela fait longtemps que Svetna avait abandonné tout espoir de quitter sa captivité, longtemps qu’elle n’avait pas rêvé parvenir à s’enfuir. Echanger l’air vicié de la mine pour retrouver le ciel, elle y avait cru quand le demi-elfe du nom de Peliz avait organisé une tentative de fuite. Quel fou. Un bon fou. Mais un fou mort, torturé et cloué comme d’autres à des solives de soutien des tunnels de la mine pour que personne n’ignore la rétribution réservée à ceux qui refusaient leur vie d’esclave.

    L’air frais, voir le ciel, la forêt non loin même derrière les barreaux d’une cage… Qu’importe la pluie qui la trempe jusqu’au os, cela lui semble plus enviable que le mouroir souterrain de Finbarr. Svetna ne se berce pour autant d’aucune illusion. Elle sait. Elle sait que personne ne revient jamais à la mine. Ceux qui meurt de fatigue ou sous les coups de fouet sont jetés dans des fosses à purins. Quand aux autres… D’après les rumeurs qui courent chez les esclaves, ils sont livrés en pâtures à des hyènes qui marchent debout ou à des ogres cannibales qui les mange vivants.

    Svetna ferme les yeux et se souvient. Le vent froid la ramène des années en arrière, parmi les siens. La vie était simple et les chants rythmaient la cérémonie du passage à la vie adulte.
    La jeune sauvageonne a cessé de mettre des coups de tête dans les barreaux, cessé de faire rire les geôliers pour venir se lover contre Svetna, comme adoucie par ce qu’elle fredonne. Le robuste prisonnier baisse les yeux quand il entend un des geoliers faire une lugubre promesse.

    « Chantes, ma jolie, fais-toi la voix. Tu chanteras pour moi je quand on monteras le camp.
    - Je préférerais qu’elle se taise, râle un autre. C’est jamais bon quand quelqu’un baragouine des trucs incompréhensibles. Qu’est-ce qui dit que c’est pas une barde ?
    - Haha… Et il va se passer quoi, ses… combien déjà ? Oui, ses sept frères vont apparaitrent pour la délivrer ? » rétorque celui qui est le chef, un demi-elfe borgne.

    Svetna frissonne. Durant toute sa captivité, elle n’avait parlé qu’une seule fois de sa famille à d’autres prisonniers. Le borgne perçoit le trouble de la prisonnière et s’approche de la cage.

    « Ne soit pas si surprise. Tous les murs ont des oreilles. C’est justement parce que tes gardiens ont appris que tu venais d’une grande fratrie que tu a gagné le gros lot. Une belle ballade… Quoi, rien ? Pas de réactions ? »

    Le chef aux oreilles pointues est presque décu et n’a aucun regard pour la petite qui siffle sa haine. Il reprend à l’attention de Svetna.

    « Toi, tu vivras. Tu n’auras qu’à faire comme ta mère : mettre plein de beaux enfants au monde. »

    Quand le convoi s’arrête le soir, les cinq geôliers font sortir provisoirement les prisonniers de leur cage. La gamine est attachée sur ordre du borgne qui prétend qu’une chiendent pareille tiendra les charognards à distance. Svetna est contrainte de leur faire à manger, quand au prisonnier, il doit monter les tentes. L’hobgobelin interpelle ce dernier.

    « Je sais ce que tu penses. Un maillet et des piquets de tente, c’est pas suffisant pour jouer au héros, n’est-ce pas ? Mais un costaud comme toi pourrait jouer des poings, non ? Tu vois, mon ami ici présent avec le tatouage sur la figure, ça lui plairait beaucoup d’opposer son style à ta force… »

    Le prisonnier, ancien soldat, ne répond pas à la provocation et se contente de faire ce qu’on lui ordonne.

    Il y’a une femme parmi les cinq geôliers. Par chance, cette archère a moins d’appétit que les autres si bien que les prisonniers qui doivent se contenter des restes peuvent se mettre un petit quelque chose sous la dent. Svetna mange sans appétit car elle sent le regard lourd de l’homme qui ne la quitte pas des yeux.

    A ce moment là, elle ignore encore que le danger n’a pas qu’un seul visage. Tandis que les autres ricanent, celui-ci ne cesse de la dévisager tout en fumant sa cigarette avec une froide lenteur. Quand il la termine enfin, il se lève et après avoir obtenu un regard d’acceptation du chef borgne, ordonne à Svetna de se lever. A ce moment, la jeune fille toujours attachée bondit avec la ferme attention de lui sauter à la gorge pour le mordre à pleine dents. L’attaque est si soudaine, si rapide qu’elle prend tout le monde par surprise. Tout le monde sauf la corde qui la tient attachée au chariot si bien qu’elle n’échoue que de peu son entreprise funeste, provoquant l’hilarité des geôliers. Qu’importe, elle lui lance un caillou ramassé à l’insu de tous un peu plus tôt. La pierre atteint le visage et fait saigner la lèvre inférieur de l’homme. Fou de colère, il met un certain temps à se calmer, gueulant que ça fait un mal de chien. Puis il se redresse alors et se tourne vers la gamine qui se bat en vain contre ses liens. Il dégage alors la cape qui couvre son épaule et pose sa main sur son épée dans un mouvement chevaleresque qui aurait davantage sa place dans la cour d’une caserne que dans la plaine du Vinland.

    « Soit, jeune fille, rien ne me fais plus plaisir que de relever un défi. »

    Il avait insisté sur ce dernier mot. Svetna entrevoit le mouvement discret du menton que lui adresse la geôlière, lui intimant de raisonner la gamine. La jeune femme va aussitot près d’elle pour lui demander de se calmer. De son coté, le prétendu chevalier est en train de se disputer avec son chef, arguant qu’il y’avait eu grande offense et que ce ne serait pas si grave d’en livrer deux vivants au lieu de trois. Très calmement, le borgne demi-elfe lui expliqua que s’il l’oblige à se répéter, il se chargera de lui formuler lui-même un défi explicite, rien que pour lui faire plaisir.

    L’avertissement fait mouche et l’homme abandonne tout désir de laver son honneur au dépend de la petite. Il fait de son mieux pour garder bonne figure puis saisit Svetna par le bras pour la trainer à l’écart.

    « Un problème, Régina ? » demande le chef à l’archère.

    Malgré la perte d’un oeil, le demi-elfe faisait preuve d’une acuité exceptionnelle. Regina garde les lèvres closes et se contenta de répondre non de la tête en regardant par terre.

    « Bien. Remets donc notre contremaitre dans sa cellule, je te prie. »

    Le prisonnier ne se fait pas prier pour retourner dans la cage. Elle s’apprête à faire de même avec la jeune fille quand le demi-elfe l’interrompt.

    « Non, celle-ci reste où elle est. Dites, on l’entend pas beaucoup chanter, la grande ? demande-t-il aux deux autres geôliers. Ramenez-les ici. »

    Le vieux moine tatoué et le prêtre hobgobelin lâchent la bouteille de whisky qu’ils se disputent et partent chercher la prisonnière et le cavalier.

    « Pourquoi tu m’as interrompu ? gueule ce dernier à son retour. Je commençais à peine !
    - Parce qu’on manque de divertissement et que la plaine est bien trop silencieuse. Visiblement, notre invitée ne veut pas chanter pour toi… 
    - Qu’est-ce que tu…, commence à demander l’archère sans pouvoir finir sa question, regrettant déjà son intervention.
    - Tu es trop tendue, Regina. Tu devrais… apprendre à faire la fête.
    - Le chef à raison, tu gâches l’ambiance. Je peux t’enseigner Rovagug… et deux trois autres trucs encore. »

    L’hobgobelin s’est rapproché de l’archère avec un sourire lubrique. Regina recule rapidement d’un pas et encoche en un éclair une flèche dans son arc.

    « Tu vas faire quoi, toute seule, hein ? demande provocateur le prêtre hobgobelin.
    - Elle va chasser, intervient le demi-elfe. Tu peux disposer si tu le souhaites, Regina. »

    Après le cavalier, c’était maintenant au tour de l’hobgobelin d’avoir du ressentiment envers le borgne, crachant par terre sa colère de voir l’archère s’éloigner.

    « Pourquoi tu t’en est mêlé ? J’ai pas peur d’elle !
    - Je le sais, ça. Mais je sais aussi qu’un bon archer fait souvent la différence entre une bonne et une mauvaise escouade. Et comme je la crois meilleure que toi à l’arc… Allez, arrêtez donc de maugréer, nous avons une invitée. On peut être très gentil, tu sais, dit-il a Svetna. On est pas assez nombreux pour remplacer tes frères mais que ça ne t’empêches pas de chanter pour nous… »

    Les geôliers échangent alors un regard mauvais. Ici, loin de tout, ils sont plus que jamais au dessus des règles. D’un mouvement leste, le moine la fait tomber lourdement au sol. L’hobgobelin grogne sa satisfaction. Le cavalier se rapproche également et l’empêche de se relever. Tout cela se passe à moins de deux mètres de la jeune fille qui devient folle de rage et griffe le vide.

    Quand le demi-elfe vient les rejoindre à son tour, il tient d’une main gantée un morceau de bois dont l’extrémité est rougie par les braises du feu de camp.

    « Oui, tu vas chanter. Et plus fort que cette furie, crois-moi. »

    C’est à cet instant que Svetna comprend. Comprend qu’il n’est pas le chef de cette bande d’ordures pour rien. Son esprit confus est déchirée entre la peur qui grandit en elle et l’acceptation renouvelée de son impuissance, une impuissance que la petite refusera sans doute toute sa vie. Avant de sombrer dans le pire des cauchemards, Svetna entend le demi-elfe dire d’une voix morne.

    « Et toi, petite, dépêches-toi de grandir. Tu apprendras que la justice ne se trouve pas sous un caillou. »
    Bannor
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    Svetna - Survivante Empty Re: Svetna - Survivante

    Message par Bannor Lun 8 Juin - 21:25

    La pluie, incessante et froide, les avaient trempés jusqu’au os deux jours durant. N’ayant plus aucun doute sur la cruauté de leurs geôliers, les prisonniers avaient eu la présence d’esprit ne pas se plaindre. En plus de dissuader les créatures errantes de sortir de leur tanière, le mauvais avaient au moins eu l’effet de doucher les vils ardeurs des mercenaires. L’accalmie vint enfin durant la troisième nuit et c’est le lendemain qu’ils arrivèrent à destination. Svetna remarque que les mercenaires ne sont pas très rassurés à l’entrée de la grotte.

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    Seul le chef, le demi-elfe borgne, semble garder son calme quand ils font quelques pas vers l’intérieur. Celui-là parle dans une langue étrange et rugueuse, ressemblant à des expectorations de glaire. Les prisonniers sont toujours dehors, coincés dans leur cage roulante. Svetna redoute le pire. A quelle créature peut bien parler ce borgne sadique ?

    C’est finalement une voix humaine qui répond dans la langue commune. A entendre le borgne, quelque chose ne va pas. Celui-ci s’agace, joue la carte de la provocation et promet finalement une danse macabre, un divertissement interessant, une autre façon de finir le travail. Peut importe qui est en face des mercenaires, ils vont certainement mourir et les moins chanceux les rejoindront dans cette cage maudite. Sans rien en voir, les trois prisonniers entendent un combat qui fait rage. Un glapissement, des cris de douleur, l’acier qui déchire les chairs et finalement plus rien. L’attente est interminable.

    Deux hommes et deux femmes apparaissent un peu plus tard, le corps maculé de sang. Ils se montrent rassurant mais qui croire ? Il faut du temps à Svetna pour accepter leur main tendue. Le prisonnier, qui répond au nom de Pierre descend de la cage le premier et se voit rapidement confier une épée.

    « Vous êtes libres, dit celui qui semble être le chef. venez vous réchauffer à l’intérieur. Nous avons de quoi manger. Il ne faut pas rester dehors, la région est dangereuse. »

    Libres… Ca ne peut être vrai. A coté de Svtena, la jeune fille campée dans une posture passive agressive le sait, elle aussi.

    Svetna - Survivante Captur27

    En rentrant dans la grotte, Svetna n’ose croire ce qu’elle voit. Leurs quatre bourreaux sont à terre. L’archère n’est pas du nombre. Il y’a aussi le corps d’un homme loup le crâne transpercé d’une flèche avec à ses cotés un énorme molosse qui peine à réaliser que son maitre est mort et essaie de le réveiller en le poussant du museau. Au fond de la grotte, une immense caverne et effectivement un feu de grande taille.

    Les quatre personnes, deux hommes et deux femmes, qui ont vaincu les mercenaires au prix de la vie de l’un des leurs se présentent comme faisant partie de la guilde des aventuriers. Svetna relâche ses épaules quand elle comprend qu’ils ne sont pas des militaires. L’archère est inconsciente et est emprisonnée dans une cellule. Rowina, la plus jeune des deux femmes confirme que deux des mercenaires sont encore en vie. Bannor et Astride, les deux guerriers les porte dans la deuxième cellule. Svetna reconnait sur le visage de la jeune fille à coté d’elle l’ombre précédent la tempête. Elle pose sa main sur la sienne et parvient à la calmer. Le quatrième et dernier aventurier est Ottoman Van quelque chose. Aimable avec les anciens prisonniers, ils leur cèdent sa luxueuse tente pour se reposer.

    Se réchauffer, manger, dormir. Qu’importe l’odeur de mort qui plane et les cadavres des trois ogres tirés dans un coin de la caverne. Au fond de cette grotte, il ne fait ni jour ni nuit.

    Vous êtes libres. Et si c’était vrai ?

    Plus tard, Svetna perçoit des brides de conversations. Rowina alerte Bannor sur le fait que l’archère fait semblant d’être inconsciente. Celui-ci va trouver la prisonnière et a un long échange avec elle. Il y’a ensuite d’autres conversations entre les aventuriers. Ces gens sont différents, Svetna en est convaincu. Si Bannor est le chef de leur groupe, il n’y a pas en apparence de relation d’autorité entre eux. Ils s’écoutent et se respectent, sans craindre un coup fourré entre eux. Ils rient même au sujet de la grande tente du riche Ottoman qui n’y aura jamais invité personne auparavant.

    Dans la soirée, Svetna assure à la jeune fille que tout va bien quand celle-ci, les sens toujours aux aguets, entend un soupir de satisfaction émaner de la tente d’Astride que Bannor avait rejoint un peu plus tôt. Svetna garde pour elle ses pensées. Elle se souvient qu’à une époque, elle connaissait le plaisir de l’étreinte d’un homme, le plaisir d’une éteinte sans contrainte. Quand à la charmante Rowina, elle ne ménage pas ses efforts. Elle passe de longues heures à déchiffrer deux parchemins et faire preuve de beaucoup de sollicitudes envers les anciens prisonniers. Rowina n’est parfois pas bien accueillie mais comment pourrais-t-elle comprendre que c’est d’espace dont ils ont le plus besoin ?

    Au matin, Bannor confirme qu’ils arrêtent leur expédition et qu’ils vont rentrer à Poing de l’Empire. La décision semble lui coûter. Svetna ne sait pas qui sont ces Thork et Grakh dont il parle. Il parle également d’une empreinte de géant, une destination presque atteinte qu’il refuse de considérer comme une destination maudite.

    Poing de l’Empire ? Svetna se souvient de ce nom. C’est là qu’elle avait débarquée après des semaines passés dans le fond d’une cale, parquée avec d’autres hommes et femmes destinés à l’esclavage. Elle rompt enfin son silence en disant qu’elle ne peut pas, qu’elle ne veut pas aller là-bas, que l’Empire est mauvais pour elles, en incluant la jeune fille qu’elle tient sous son bras.

    « Il n’y a nulle part où vous pouvez aller. Ces terres sont hostiles. La forêt, la plaine, les marais, les dangers sont trop grands, dit Bannor.
    Alors, gardez-nous avec vous. »

    Svetna est elle-même surprise par sa réponse. Elle sait qu’elle n’est pas en position de négocier quoi que ce soit. Quelqu’un parle d’un Lucéron qui travaille seul pour entretenir la guilde. Sans savoir qui est cet homme, Svetna hoche nerveusement la tête et assure qu’elle travaillera avec lui et qu’elle ne dérangera pas. Bien qu’il s’applique à ne pas le montrer, elle voit que Bannor semble satisfait de cette résolution.

    « Et la tigresse ? demande-t-il.
    Elle reste avec moi. » répond-elle en retenant de son mieux la jeune fille prête à en découdre.

    Svetna est consciente que le guerrier n’est pas dupe et que contrairement à elle, la petite ne sera sans doute pas une servante docile. Quand à Pierre, il redoute un procès hâtif contre lui et d’être condamné à mort pour désertion. Ottoman soulève l’iniquité de la chose et assure que rien n’est joué.

    C’est Astride, cette femme qui est tout ce que Svetna ne sera jamais, portant armure et une immense faux, qui conduit le groupe à travers la plaine. Les rôles sont inversés, c’est maintenant l’archère et les deux geôliers encore en vie qui sont dans la cage. Astride prend régulièrement quelques indications de Régina, si bien qu’ils atteignent un lieu où ils font une halte. Les uns se dégourdissent les jambes tandis que l’archère révèlent une cachette avec une petite fortune.

    Svetna voit les aventuriers échangés quelques regards circonspects. Bannor extrait des possessions des mercenaires vaincus un arc long, un carquois et marteau de guerre léger et les remet à Régina, visiblement très surprise du geste. Avant de partir, la mercenaire observe une derrière fois Svetna et la jeune fille avant de regarder le sol avec embarras.

    « Tu es sûr de toi ? demande Astride qui rejoint Bannor en regardant l’archère s’éloigner.
    - Sûr, non. Mais assumer mes actes, oui. J’ai pas besoin de faire de promesse pour faire ce que je dis.
    - Et les prisonniers ? Vous ne voulez pas les interroger maintenant qu’on en sait plus avec les parchemins que j’ai déchiffré ? demande Rowina à voix haute. Je pourrais essayer d’utiliser la baguette de soins sur eux…
    - Tu plaisante, on est sur les rotules et tu veux dépenser les charges de la baguette sur eux ? »

    Voyant Bannor réfléchir, Svetna intervint, comme si dans sa voix parlait la volonté de ses sept frères réunis.

    « Vous ne pouvez pas faire ça ! Ils ne méritent pas de vivre ! » 

    Chacun donna son avis. Il fut question de preuve, de réunir des témoignages. Il fut question d’un certain sénéchal à qui certains faisait confiance, d’autres non.

    Svetna explosa en découvrant sa poitrine.

    « Regardez ! Toi, regardes ce qu’ils m’ont fait ! Donnes moi une arme, que je les tue moi-même ! »

    Rowina eut un haut le coeur. Astride ne sourcilla pas. Ottoman ajusta pudiquement l’arête de son chapeau devant sa ligne de vue. D’abord sans voix, Bannor s’approche d’elle et saisit les pans de son vêtement pour couvrir sa poitrine blessée.

    « Tu ne te rends pas compte, tuer quelqu’un de sang froid, ça n’a rien à voir avec défendre sa peau. C’est devenir un monstre.
    - C’est eux les monstres. Elle… L’archère que vous avez laissé partir, elle ne m’a pas fait de mal mais eux…
    - Ca suffit. Je te laisserais pas devenir ça. » ordonne-t-il.

    Bannor revient alors vers la cage et en tire les deux corps inconscients pour les faire tomber du chariot jusqu’au sol. Il prend ensuite la rapière du borgne qu’il enfonce au travers des crânes en passant par l’oreille. Il se relève ensuite, essuie l’arme ensanglantée sur le vêtement d’un des deux mercenaires exécutés et la jette dans le chariot où elle rejoint le reste du butin.

    Svetna ne bouge pas et regarde incrédule les deux corps inertes. Elle entend quelqu’un dire que les charognards les auront mangés d’ici quelques heures. Elle reste debout même si elle sent que ses jambes menace de la lâcher. Ils sont morts. Les monstres peuvent mourir. Vraiment ? Semble lui dire le visage blême du demi-elfe borgne qui baigne dans une mare de sang qui coule de sa propre oreille. Je ne t’entends pas chanter.

    A coté d’elle, la jeune fille regarde elle aussi le rictus narquois du cadavre. Elle se soustrait sans mal à la main molle de Svetna sur son épaule. En un bond, elle est sur le borgne, une pierre en main qu’elle gardait sur elle depuis la caverne. Elle frappe. Elle frappe. Elle frappe encore et encore, réduisant sa figure en bouillie, devant six personnes pris de vitesse.

    Quand Bannor va pour s’approcher de la petite dans le but de la séparer du corps, Pierre lui demande de laisser faire en posant sa large main sur le haut du bras.

    « Et toi, petite, dépêches-toi de grandir. Tu apprendras que la justice ne se trouve pas sous un caillou. »
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    Svetna - Survivante Empty L'Ange et le Guerrier

    Message par Bannor Mer 15 Juil - 14:46

    Svetna garde la tête baissée quand ils franchissent, deux jours plus tard, le poste de garde de Poing de l’Empire. Si elle connaissait cette enclave de nom, elle n’en avait vu que les souterrains et le port sur lequel on l’avait débarqué de nuit sans ménagements, ainsi que de nombreuses autres victimes qu’elle perdit rapidement de vue par la suite. Par chance, aucun des gardes du guet ne se montre particulièrement soupçonneux quand leur petit groupe mené par Astride et Bannor en franchit le seuil. Quand elle découvre ensuite le bâtiment de la guilde pour la première fois, elle en apprécia aussitôt l’architecture. A dire vrai, elle aurait même apprécié un taudis du moment que ce n’était pas une nouvelle prison souterraine.

    Bannor la présente, ainsi que la jeune fille, à un halfling du nom de Lucéron à qui il explique rapidement qu’elles sont là pour l’aider à tenir la maison et qu’il paiera de sa poche si nécessaire. Les pensionnaires présents s’intéressent davantage à Pierre en commentant entre eux qu’un costaud pareil pourrait faire de l’ombre à un dénommé Malek. Svetna remarque un échange de regard entre Bannor et une jeune femme à l’aspect démoniaque. Celle-ci a non seulement une peau plus rouge que rose, des cornes et une queue mais aussi une immense cicatrice qui barre son visage. Dans un mouvement de peur incontrôlé, Svetna détourne rapidement le regard quand cette femme regarde dans sa direction. A ses cotés, la petite tigresse observe cette scène un peu étrange puisque la tieffeline détourne également le regard avec pudeur.

    Le temps de recevoir quelques informations pratiques de l’aimable Lucéron, Bannor est revenu du chariot avec le corps inerte de l’homme-chien et donne rendez-vous au tomber du jour à ceux qui le veulent pour célébrer la mémoire d’Osward. Lucéron leur donne ensuite une chambre en s’excusant pour l’exiguïté du lieu. S’il savait ô combien cet endroit sous les combles ressemble à un palais en comparaison des grottes où on les entassaient chaque nuit. Un lit, un véritable matelas ! Si la jeune fille ne partage pas ses larmes de joie, elle se tient néanmoins près d’elle avant d’aller explorer elle-même son couchage une fois qu’elles sont seules. Svetna fait mine de ne rien remarquer quand elle voit la petite sortir de sa manche un petit couteau pour la glisser sous son oreiller. Demain sera un autre jour et il sera alors temps de lui expliquer qu’elle ne doit pas voler les maitres… non, voler ceux qui nous accueillent quand bien même il ne s’agit que d’un ustensile de cuisine.

    Une fois installées et lavées, elles redescendent ensuite pour gouter les bons plats de l’aimable halfling qui refusa toute aide en cuisine en prétextant qu’elles commenceront le lendemain. Incapables qu’elles furent à faire un choix sur cette ardoise, mais surtout incapables de lire le menu, Lucéron leur fit un copieux assortiment de toute la carte. La jeune fille regarda longuement l’ardoise et commença a frotter sa main dessus, comme admirative de l’effacement de la craie. Svetna l’interrompit à temps et s’excusa pour son comportement. La salle est alors relativement déserte, à l’exclusion de la guerrière nommée Astride, qui ne s’est pas jointe aux autres dehors pour l’enterrement de l’homme-chien. Elles mangent rapidement, débarrassent leurs assiettes et remontent dans leur chambre de bonne pour leur première vraie nuit de sommeil depuis bien longtemps.

    Svetna se réveille en sursaut dans la nuit et découvre la jeune fille, le visage collé à la lucarne avec une certaine fascination dans le regard. Quand Svetna la rejoint, intriguée, ce qu’elle voit à son tour ne manque pas de la surprendre.

    « Allez, arrêtes de les regarder. C’est mal d’espionner. »

    La petite a une mauvaise grimace et lance au dehors un regard mauvais.

    « Allons, laisses-les tranquille. Je te dis qu’ils ne sont pas en train de se battre. C’est… comme une danse… un peu bizarre, c’est vrai. Tu comprendras quand tu seras plus grande. Et ne t’inquiètes pas, je suis sûr que Bannor n’est pas en danger. »

    Quand Svetna se réveille au matin, elle prend conscience de deux choses : elle ne souvient pas avoir déjà autant dormi et découvre sous la lucarne des tracés à la craie. Mais ce n’est pas le moment d’interroger la petite sur la signification de ces arabesques et des ces flèches, ni lui reprocher un énième vol et lui expliquer que demander une craie est du domaine du possible, car elles ne sont plus au milieu de geôliers suspicieux de tout. Quand elle rejoignent Lucéron pour se mettre au travail, Svetna s’excuse tellement de leur retard que le halfling lui demande de se baisser et lui fourre un pain moelleux dans la bouche en guise de petit déjeuner ce qui provoque l’amusement de la jeune fille, dans un rire qui s’apparente davantage à un bref sifflement de serpent. Une fois rassasiées, elles se mettent au travail en commençant par l’écurie. Ce n’est pas la tâche la plus facile, mais Svetna tient à prouver que ce n’est pas une erreur de les engager.

    Un peu plus tard, Bannor vient les trouver toutes deux et les somme de l’accompagner dans le jardin. Svetna le trouve passablement tendu. Il a préparé trois bâtons, un pour chacune d’elle et leur dit en agrippant le troisième :

    « Avant d’envisager à nouveau de tuer quelqu’un, ce qui est la dernière chose à faire de sa vie, croyez-moi, mieux vaut apprendre à ne pas se faire tuer ».

    Mais Svetna ne veut absolument pas apprendre à se battre. Bannor n’insiste pas outre mesure. Par contre, la jeune fille s’empare aussitôt d’un bâton et tombe au sol dans la foulée, balayé sans avertissement par le guerrier.

    « Celui qui tombe le premier perd à coup sûr le combat, tigresse. Allez, debout ! »

    Bannor lui met alors un coup de bâton sur la cuisse quand elle se relève.

    « Hé, on se réveille ! Qu’est-ce qu’il y’a ? T’es fatiguée d’être jeune ? C’est pourtant simple : si on te fait tomber, c’est pour t’achever. Donc, relèves-toi toujours en t’appliquant à pas te faire couper en deux. »

    L’entrainement prend une tournure déplaisante aux yeux de Svetna. Ce n’est pas pédagogique du tout ! Si la jeune fille fait montre d’une hargne féroce, elle semble apprendre vite et en redemande encore malgré les coups de bâton et la frustration. Svetna remarque un peu plus tard que l’amie de Bannor vient d’arriver dehors et qu’elle observe discrètement la scène, un petit sourire au coin de la bouche. Quand Bannor se rend compte que Taliah est présente, il a d'abord une attitude renfermée à en juger ses lèvres serrées. Il regarde par terre en faisant la moue puis prend un inspiration avant de relever la tête vers la nouvelle venue. Finalement, il ne retient pas une expression joyeuse en la regardant. Faire sourire Bannor n’est pas le moindre des mérites de Taliah. Grâce à la diversion qu'elle apporte, la petite assène un violent coup de bâton sur le crâne de Bannor. Le guerrier hurle de douleur. La gamine grogne sa satisfaction et est déjà en garde tandis qu’il se frictionne le cuir chevelu pour limiter le risque d’apparition d’une vilaine bosse sur le crâne.

    « Je les rends toutes folles, que veux-tu… » lâche Bannor à l’attention de Taliah.

    La grimace de douleur de la tieffeline cède la place à un rire, cédant à son tour la place à une expression effarée quand elle voit, tout comme Svetna d'ailleurs, un nouveau coup de bâton arriver sur la figure de Bannor. Le guerrier se baisse néanmoins au dernier moment et place son bâton devant le pied arrière de la jeune fille qui s'étale à plat ventre à cause de son élan.

    « Tu tiens pas debout, tigresse ! »

    La gamine crache l'herbe qu'elle a dans la bouche en maugréant et reçoit un violent coup de bâton sur les fesses.

    « Et qu'est que tu fais encore par terre, hein ? C’est pas une tigresse que t’es mais un lézard ! »

    C’est Svetna qui met finalement un terme à l’entrainement. Entre Bannor qui pousse son élève jusque dans ses retranchements et la jeune fille qui fait montre d’une impressionnante résilience, cela la renvoie lentement mais sûrement aux nombreux drames qui se sont produit devant ses yeux. Quand elle s’éloigne avec la petite, elle a encore trop de mal à chasser les souvenirs sinistres de ses pensées pour voir le sourire satisfait du guerrier d’âge mur. Svetna ne sait pas encore que ce jeu violent, cette danse macabre recommencera tous les jours, le plus souvent à l’initiative de la jeune fille.

    Quelques jours plus tard, alors qu’elle entretient la bâtisse, Svetna est témoin d’une conversation entre l’homme nommé Ottoman Van Chesterfield et Pierre, ancien compagnon de captivité mais avant tout ancien soldat. L’élégant pistolier est porteur de bonnes nouvelles : il a réussi a obtenir la réintegration de Pierre dans l’armée qui ne sera inquiété d’aucun chef d’accusation pour sa disparition. Avant son départ de la guilde, Bannor s’entretient avec Pierre pour lui souhaiter une bonne ré-incorporation militaire. Le guerrier plaisante sur les frusques qu’il a donné au soldat de métier non sans l’interroger une dernière fois sur son expérience à Finbarr. C’est ainsi qu’il apprend que les geôliers utilisent des extraits alchimiques pour rechercher - ou manipuler, Pierre n’est pas trop sûr - l’adamantium de la mine.

    Bannor sollicite plus tard Svetna pour partager ce qu’elle a appris durant sa captivité avec lui mais aussi avec un autre membre de la guilde. Elle a bien conscience des nombreuses précautions qu’il prend pour la rassurer mais accepte car elle sait ce qu’elle lui doit ainsi qu’aux autres membres de l’expédition. La liberté mais aussi la justice.

    C’est dans une pièce fermée que Svetna se retrouve avec Bannor et Riku Blancoussin, un homme chat. Ce dernier a une grande soeur captive à Finbarr dont on sait que les talents de soigneuse sont précieux. Une fois un peu plus à l’aise, Svetna parle. Elle raconte les transports d’esclaves débarqués discrètement à Poing de l’Empire, comment elle fut convoyée par des souterrains. Elle raconte le transfert vers Finbarr à travers les marais dans des barques à fond plat, le placement dans des camps « éducatifs », le triage, les humiliations nombreuses et les morts. Les morts de fatigue, de faim, de maladie, ceux qui n’arrivent plus à respirer dans la mine ou à cause des mauvais traitements. Riku et Bannor serrent les dents quand elle développe le sujet du tri et la désignation de bétail pour les différencier. Les esclaves sont du bétail qui parle pour les différencier des animaux de traits. Du bétail qui parle à l’exception de la jeune fille.

    Grâce à ses explications, l’homme chat est parvenu à dessiner un plan relativement précis de Finbarr. Devant l’intention de Bannor de tout savoir sur ce qui se trame là-bas, Riku lui rappelle qu’il veut sauver sa soeur avant tout autre chose. Sur ce point, le guerrier répond à l’homme chat que sa soeur, qui s’occupe depuis tant d’années des autres aura surement - si ce n’était pas déjà le cas auparavant - développé un niveau important d’empathie pour son prochain et qu’elle ne voudra certainement pas quitter les lieux sans sauver le plus de monde possible. Svetna intervient alors, se surprenant à tutoyer le guerrier.

    « Bannor, que veut-tu faire ? C’est de la folie, ils sont trop nombreux. Tu ne connais pas ces gens. Ils sont mauvais.
    - Je sais mieux que personne de quoi sont capables les mauvaises personnes pour atteindre leurs objectifs. Mais… oui, ne t’inquiètes pas. Je n’ai pas l’intention de tenter quoi que ce soit sans avoir un minimum de chance de réussite. »

    Svetna se lève alors pour venir près de lui et pose sa main sur la joue du guerrier.

    « Tu es un fou, Bannor. Un bon fou. » dit-elle avant de laisser les deux hommes entre eux.

                                                   ° ° °

    La jeune fille bondit avec vivacité pour éviter l’attaque du guerrier et, alors qu’on pourrait penser qu’elle saute par dessus le coup censé la faucher, elle prend appui sur l’arme d’hast du Bannor avec son pied arrière autant pour l’envoyer se ficher dans l’herbe que pour se retrouver à la bonne hauteur pour envoyer son bâton au visage de son adversaire. Mais dans un mouvement rapide, le guerrier a déjà dégainé une autre arme qu’il utilise pour parer in extremis le coup de bâton. Elle pousse un grognement de rage et se replie rapidement avant de subir une contre attaque.

    « Allez, ça suffit, dis Bannor en essuyant son front en sueur. Et arrêtes de faire cette tête, veut-tu, on dirait un camé en manque, croisé avec un homme rat. Quoi encore ? »

    Si elle parlait peu, il avait appris à la comprendre.

    « Mais oui, je vais t’apprendre ce mouvement, répond-il à la question muette d’un signe de tête. Il faut encore développer tes réflexes innés. Allez, c’était le dernier entrainement avec moi, tigresse. Le dernier avant plusieurs jours. Je pars en expédition. »

    La jeune fille a un sourire moqueur et place ses index et majeurs au dessus de sa tête pour simuler des cornes et se met à battre des coudes en grimaçant.

    « Très drôle, râle Bannor. De quoi je me mêle, petite curieuse, hein ? Bon, pour tes entrainements… Tu vas pouvoir en faire avec Malek, il est d’accord. Son plus gros point faible, c’est qu’il se croit très fort. Utilise des feintes, tends lui des pièges, il tombe toujours dedans. Bats-toi avec Astride aussi. Je te préviens, elle voudra pas t’entrainer mais on s’en fout, attaques-la quand même.
    - Dis-moi que c’est une plaisanterie, Bannor, intervient Svetna qui a pris l’habitude de faire sa pause en les regardant. Cette femme, Astride, elle… elle me fait peur. Elle ne va pas du tout aimer ça.
    - Non. Et m’est avis qu’elle voudra même mettre une rouste à notre petite tigresse.
    - Je dis que c’est une mauvaise idée, insiste Svetna.
    - Ha ! Il faut bien que jeunesse se fasse. »

    Bannor étouffa un petit rire tandis que son poing fermé vient rencontrer le poing fermé de la jeune fille qui a elle aussi un rictus amusé.

    « Pas un pour rattraper l’autre, commente Svetna en levant les yeux au ciel.
    - Non. Ca, c’est ton travail. C’est toi son ange gardien. »

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