Aventures en terres inconnues

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    Yaraëmon... aventurier

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    Yaraëmon... aventurier Empty Yaraëmon... aventurier

    Message par Bannor Dim 14 Mar - 14:44

    Yaraëmon... aventurier Yaraem10

    Yaraëmon est un demi-elfe qui est arrivé au Vinland par bateau, le même que Bergren.
    Le mélange des deux races est assez réussi, lui donnait des traits et un physique agréable. Il n'a pas la langue dans sa poche et se comporte en permanence avec aisance, tutoyant souvent ses interlocuteurs.
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    Yaraëmon... aventurier Empty Gifted

    Message par Bannor Dim 28 Nov - 21:40

    L'an 139, quelque part sur une côte du Vinland

    Yaraëmon... aventurier Captur37

    Un peu aigre, le demi-elfe se tient à l’arrière quand le groupe d’aventurier se présente à la matrone batiri. Il  sait qu’il pourrait très bien faire comme à l’accoutumée et ne pas tenir compte des exhortations à tenir sa langue. Mais qu’ont-ils tous à être aussi pudique et a considérer le plus vieux métier du monde comme une infamie ?

    La matrone qui les reçoit mérite bien son titre. Elle personnifie un mélange de sagesse et de courage et il est évident qu’elle est toute à ses responsabilités envers les siens. Et que dire de ses éloges pour Taliah ! « Yelo la sauveuse, Yelo la brave ! » Il manque Taliah l’équarisseuse, pense-t-il en la revoyant fouiller dans les entrailles d’une créature récemment tuée. La surprise passée, Yaraëmon note mentalement quelques phrases de la matrone qui sont du meilleur effet pour faire des louanges. C’est que c’est plaisant à entendre. Si cette guilde est une étrange famille,  beaucoup de ses membres sont assez incroyables.

    Yaraëmon sourit en coin en voyant Bergren reprendre foi en quelque chose. C’est que l’asticoter régulièrement pour l’empêcher de sombrer dans une mélancolie abyssale digne d’Evrod est une activité dont il se passerait bien. Ce qu’il faut vraiment au centaure, songe-t-il, c’est une croupe accueillante. Yaraëmon sort de ses pensées quand Bergren cède à son besoin de tout balancer : sa tête mise à prix, le danger que sa présence fait peser sur la communauté… comme si l’armée impériale allait apparaitre comme par magie. Cela n’impressionne pas la matrone. Non seulement elle protège les siens mais voilà qu’à travers ses mots, elle couve aussi les amis de Taliah de sa bénédiction.

    Le cerveau fertile de Yaraëmon voit déjà la scène du couchage : mamie en train de les border, Taliah roucoulant d’être adulée par une horde de batiris lui faisant une manucure, Bergren quémandant une histoire pour s’endormir, Ottoman réclamant un périmètre de distanciation raciale et l’athlétique Sual traçant déjà une démarcation au sol du tranchant de sa lame. Mais pour l’heure, l’ambiance est plombée de récits de morts-vivants sortant des eaux, de monstres en tout genre, de massacres, de dragons et d’esclavagistes.

    C’est là que Yaraëmon voit vraiment cette très jeune fille cornue à la peau rouge. Il sait qu’à cet instant, il ne peut pas leur faire changer de sujet mais il peut essayer de soustraire l’attention de la petite de toutes ces considérations sinistres. Tout sourire, Yaraëmon s’approche d’elle et s’accroupit pour se mettre à sa hauteur puis, tel un camelot illusionniste, révèle avec emphase une poignée de glands comme s’il s’agissait d’un trésor incroyable. Quand la jeune cornue les accepte avec l’assentiment de sa mère, le demi-elfe chuchote à la demi-batiri de ne pas les écouter, qu’il ne sont pas drôles avant de plonger dans ce regard d’enfant, un regard joyeux.

    Terquepan, 20 ans plus tôt

    Le petit garçon aux oreilles pointues admire la petite pierre luisante que l’elfe debout devant lui vient de poser dans sa main.

    Yaraëmon... aventurier Pere_y10

    « Fais la voler, lui dit l'adulte.
    - Mais… Je ne peux pas.
    - Ce n’est pas en pensant de la sorte que tu y arriveras.
    - Euh…
    - Tu es doué, c’est de famille. Et ce n’est pas d’apprentissage dont tu as besoin, mais de pratique. Imagines que tu doive simplement faire un effort… inconscient, sans forcer car très facile. »

    Le jeune demi-elfe sourit, son visage s’éclaire alors suite à une pensée agréable. La gemme frémit dans sa paume avant de s’élever. Les narines de Yaraëmon hume une odeur étrange et son palais réagit à une discrète saveur légèrement amère et astringente, comme le jour où il avait gouté un vin onéreux, une boisson agréable au demeurant.
    De son autre main, il manipule la pierre avec des fils invisibles pour lui faire faire un cercle presque complet avant qu’elle n’échappe à son contrôle pour tomber sur le parquet. Sa mère vient de faire brusquement irruption dans la pièce.

    L’inclinaison que les sourcils de Silva dessinent sur son visage ne laisse aucun doute sur son irritation.

    « Tu viens sans prévenir ? lance-t-elle à l'elfe. Pars avant que je ne demande au videur de te mettre dehors !
    - Tss.
    - Je suis sérieuse.
    - Je sais. »

    Calme, l’homme fait quelques pas pour se placer au centre de la grande chambre, comme pour signifier qu’il n’entendait pas être éconduit puis reprit.

    « D’abord le videur devra essayer. Mais toi et moi savons qu’il sait qui je suis et qu’il n’osera jamais me toucher. Mais peut-être aurais-tu préférer que je te fasse interrompre durant ton travail ? »

    Yaraëmon escamote discrètement la petite gemme au sol tandis que les épaules de sa mère s’abaisse. Les adultes se regardent en silence pendant un long moment. Cette fois, c’est l’elfe qui cède en détournant le regard vers le garçon. Yaraëmon à la conviction que son père lui sourit. C’est presque imperceptible mais le jeune garçon a appris à voir et à entendre. Grandir dans une maison de joie est comme grandir dans une bibliothèque, les clients sont autant de livres ouverts pour peu qu’on s’y intéresse. Ivres, ils disent ce qu’ils taisent au dehors. Avec le temps, on apprends à reconnaitre qui est timide, qui est honteux, qui est nerveux, qui est saoul et qui posera problème.

    « Sors, Yara. »

    Yaraëmon... aventurier Tumblr11

    L’injonction de sa mère est sans appel. Yaraëmon prends son temps, choisit un objet pour s’occuper puis lui en préfère un autre au fond de son coffre à trésors en tout genre. Les yeux de Silva rit de son attitude cabotine. Un dernier regard à son père et il ferme la porte, sachant qu’il ne sait pas quand cet homme reviendra ni s’il reviendra un jour. Une fois dehors, le petit malin se glisse furtivement dans une chambre voisine inoccupée et plaque une oreille indiscrète pour les espionner.

    « …le garçon me parait en bonne santé.
    - Notre garçon, répond-elle d’un ton amusé.
    - Oui, notre garçon, acquiesce-t-il.
    - N’attends pas que je te demande comment se porte ta famille. »


    Les mots avaient claqués sans décontenancer l’elfe.

    « De la jalousie ? Allons, Silva, tu sais bien…
    - …que tu es un grand homme de l’Empire et moi une putain ? Oui.
    - Pourquoi rendre les choses compliquées ?
    - Parce que nous n’avons pas besoin de toi ?
    - Je le sais bien. Et pourtant, ta patronne et toi acceptez bien mon soutien financier…
    - Ne t’inquiètes pas, personne n’est au courant, répond-elle avec une espèce d’ironie dans la voix. »

    Yaraëmon entend son père faire trois pas avant de demander.

    " Combien de temps comptes-tu rester en colère ?
    - Et toi, vas-tu me dire ce qui t’amène en dehors de « je-viens-voir-si-mon-fils-progresse-en-magie » ?
    - J’ai entendu que tu avais rencontré quelqu’un, répond l'elfe après réflexion.
    - Tiens donc. Qui est jaloux ici ? »

    Un silence plane dans la chambre.

    « Il n’est… pas resté, reprend Silva avec une intonation de dépit.
    - Tu m’en vois désolé.
    - Vraiment ? Tu n’en as pas vraiment l’air.
    - C’est l’histoire de ma famille, ne pas avoir l’air de ce que nous sommes. Bien. J’admets que si j’en suis effectivement désolé pour toi, je dis aussi que c'est une bonne chose pour Yaraëmon. Un guerrier hanté par ses démons n’est pas un bon modèle. Changeons de sujet, veux-tu ? »

    De l’autre coté de la cloison, le garçon entend des pas plus légers puis le bruit d’une bouteille que l’on ouvre et de verres que l’on remplit. La dernière chose qu’il entend est une brève incantation suivi d’un silence, un silence absolu.

    Le brouhaha de la grande salle en bas est rapidement plus intéressant. La vieille Sretena ne le laisse pas longtemps sans rien faire et l'emploie au débarrassage des tables. Tout affairé à bien prendre en main les chopes vides pour ne pas les faire tomber, il n’oublie pas cette bourse à la ceinture du client assis là-bas, cette bourse qui le nargue. Il sait que c’est trop difficile. Il lui faudrait échapper à la vigilance de la marâtre qui est moins bigleuse que son âge ne le laisse supposer et de la jeune rousse qui rit à gorge déployée avec le propriétaire de la dite bourse. Une fois seul dans la cuisine et allégé des chopes dans la cuisine, Yaraëmon transpose le problème des liens de cuir de la bourse du client avec le noeud lâche d’un tablier suspendue. Il échoue une première fois puis une deuxième à manipuler par magie le laçage du tablier. Trop difficile, peut-être. Mais il est doué, c’est de famille.

    Yaraëmon... aventurier Unknow10
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    Yaraëmon... aventurier Empty Feeling good

    Message par Bannor Jeu 21 Avr - 11:33

    19 octobre


    Ploc.

    Les sabots frappent le sol ferme avant que le centaure n’avance dans une mélasse fongique peu rassurante.

    Ploc.

    Un battement d’ailes précède la chute d’une bombe qui glace tout autour d’elle.

    Ploc.

    Le samouraï défie de la pointe de son sabre un ennemi deux fois trop grand.

    Ploc.

    Ploc.

    Yaraëmon a un frisson. C’est que l’eau du bain - ce bain tant attendu - commence à refroidir.  Qu’importe, il décide d’y retourner une fois de plus. Retourner en pensées dans ce voyage vers l’inconnu. Il trempe à nouveau le tissu dans l’eau puis l’essore comme on tord le cou d’un poulet. L’eau tombe bruyamment dans le bain. Le demi-elfe referme les yeux quand le silence revient. Elles sont là, ces grottes humides qu’il tapisse mentalement de tâches saumâtres et bombées. Ses oreilles d’elfe frissonnent quand une nouvelle goutte tombe dans l’eau.

    Ploc ! Là, vous avez entendu ? Non ? Yaraëmon serre plus fort le tissu humide.
    Ploc ploc ploc. Reculez ! Il ne faut surtout pas respirer ça !

    Et si c’était ça, ce qu’il désirait vraiment ? Ne rien planifier et éprouver ses capacités face à l’inattendu. Voir les failles dans l’urgence, les brèches à colmater, éviter le pire encore et encore. Côtoyer la mort pour se sentir vivant. Dépasser la peur et rester lucide car la moindre erreur peut être fatale. A ceci près qu’il avait du jouer serré, bien plus qu’à l’accoutumée. Son numéro d’andouille n’avait pas trompé. Difficile d’avancer masqué face à quelqu’un d’encore plus alerte que lui-même. Yaraëmon a la conviction qu’il s’en est fallu de peu pour qu’il ne rejoigne sans être consulté les rangs d’un maitre à la personnalité complexe. Pris d’un frisson, il ouvre les yeux avec l’appréhension d’être épié.  

    Personne. Yaraëmon est bien seul. Il plisse les yeux en songeant qu’il doit faire attention à la tentation de mimétisme. Il sort du baquet d’eau, se sèche énergiquement puis use d’un tour mineur pour dissiper le reliquat d’humidité sur sa peau. Il se concentre pour arrêtez de ressasser les dangers de cette interminable expédition mais ses pensées vagabondent dans cette nouvelle vie d’aventurier.

    On devait faire quoi au départ déjà ? Ah oui, prêtez main forte aux camarades de la guilde parce que Malek était trop occupé pour aller à Vésilyr.

    Yaraëmon sourit en songeant aux compagnons de guilde dont il ne partagera plus le chemin. La prude Camille, l’illuminé Luna, le distant Jérome, le loyal Patapé. Il se demande ce que deviennent Evrod, alias le meilleur guide du Vinland, et Alvina. Alvina… murmure-t-il en se grattant la glotte. Dans un autre genre de duo, il y’a aussi Ottoman et Sual. Et s'il échangeait avec elle rien que quelques jours leur rôle de chaperon ? Peu probable qu’elle accepte mais ce serait tellement cocasse. Bergren arrêterait peut-être de se plaindre devant une guerrière qui finirait par lui mettre des coups de pied au cul. Quel crapule, celui-là. Le demi-elfe avait fait promettre au centaure de se considérer chez lui dans chaque endroit pour arrêter de se sentir étranger partout. Yaraëmon est assez fier de cette idée mais songe que dans l’immédiat, ce serait pas mal que Bergren diffère cette bonne résolution.

    C’est qu’il serait capable de taper dans le stock de cornichons, le percheron !

    Voilà maintenant Yaraëmon habillé et propre comme un sou neuf. Il est urgent de se changer les idées avant d’être atteint de sentimentalisme aigüe.

    Vivre au jour le jour, voilà ! Repartir en mission ? S’endurcir et avoir le cuir tanné, hein, comme disent les vétérans de la guilde. Mais bon, j’aime déjà pas avoir les doigts fripés en sortant du bain…

    Il songe que ce qu'il lui faut, c’est prendre du bon temps avec des compagnons de boissons car il n’y a que les gens tristes qui boivent seuls. S’il y’avait un dieu des héros contrariés, une certaine moine aux fesses d’acier apparaitrait par enchantement dans Poing-de-l’Empire avec l’envie impérieuse de réchauffer la froideur de cette nuit d’octobre. Bien moins hypothétique, il sait qu’il a la possibilité d’aller retrouver une certaine couturière chez elle mais elle ne supporte pas la comparaison avec la piquante Dima. Sans trop y réfléchir, il prend la direction de l’estimée concurrence. Il hésite un moment devant le perron surmonté d’une lanterne rouge.

    Yaraëmon... aventurier 4d468e10

    Concurrence… non après tout. Je. Suis. Un. Aventurier. Et pas n’importe lequel, en plus, songe-t-il en frottant du pouce l’anneau qu’il porte à l’annulaire droit.

    Une fois à l’intérieur, il déambule dans la salle commune en faisant mine de chercher un ami à rejoindre. Se changer les idées, oui. Dans un coupe-gorges, non. Repérer les accès, les clients potentiellement problématiques et les videurs susceptibles de ramener le calme. Il déniche un tabouret libre à l’extrémité du bar. Ce sera parfait vu que les bagarres éclatent le plus souvent au centre comme si les chamailleurs avaient besoin d’être vus et entendus de tous. Il ne faut pas longtemps pour qu’une jeune femme dont il a croisé le regard un peu plus tôt vienne le rejoindre.

    « Boire tout seul une bouteille de vin ? » 

    Elle a une jolie voix en plus d’une démarche féline. Elle se rapproche pour parler à son oreille.

    « Je devine que tu as besoin de compagnie… L’alcool ne résout pas les problèmes.
    - Peut-être, mais l’eau et le lait non plus. »

    Yaraëmon sourit à la jeune femme et lève son verre pour porter un toast.

    « À ta santé, Bergren. »

    La prostituée regarde par dessus l’épaule du demi-elle puis l’interroge.

    « Tu attends un ami ? Tu veux qu’il nous rejoigne ?
    - Je crois pas que ce soit une bonne idée. L’un de nous supportera pas la comparaison. »

    La jeune femme a une grimace moitié aimable, moitié agacée. Yaraëmon la retient avant qu’elle n’aille chasser un autre client.

    « Attends. J’ai envie d’expériences nouvelles. »

    Elle revient se lover contre lui.

    « Et bien, offres moi un verre puis on va aller se trouver un coin calme et parler de quoi tu as envie…
    - Je sais de quoi j’ai envie et de quoi j'ai besoin. Payer sera un bon début. »

    It's a new dawn, it's new day, it's a new life
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    Yaraëmon... aventurier Empty Dehors, tu dois avoir si froid (1/2)

    Message par Bannor Lun 26 Déc - 22:59

    23 décembre. Très tard dans la nuit.

    Yaraëmon regarde le plafond depuis assez longtemps. Il tourne la tête vers son amante endormie, envisage de la réveiller pour une danse de plus mais s’abstient finalement. S’il sait de longue date que les plaisirs du corps soignent les maux de l’âme, il n’est pas sûr que cela suffise à faire taire ce bruit de fond dans son crâne. Le demi-elfe se lève sans bruit, se rhabille sommairement et remet sa corne de bière dans l’intérieur frais de son sac.

    Silencieux, il contemple la jeune femme en jouant du pouce sur l’anneau qu’il porte à l’annulaire droite. Il se penche vers elle pour l’embrasser quand il sent que la magie de transmutation va faire effet. Yaraëmon s’évapore au moment où ses lèvres se posent sur cette peau de porcelaine.

    Yaraëmon... aventurier Captur38


    Une brume vaporeuse se glisse sous la porte et s’échappe par la toiture. 

Tandis que Poing-de-l’Empire dort profondément sous un maigre croissant de lune, la brume prend de la hauteur avant de redescendre une fois sa destination atteinte et s’étant assuré d’être seul. Il reprend consistance quelques pas au dessus du sol et retombe sur ses pieds tant bien que mal.

    « Merde ! Je me croyais plus bas… Tu seras gentil de rire en silence, crapule » commente-t-il en se redressant tout en défroissant machinalement son pantalon de laine. Il regarde de part et d’autre puis reporte son attention sur l’objet de sa visite, une tombe anormalement démesurée.

    « Dis donc, qu’est-ce que tu dois faire chier avec une pareille compagnie. Z’ont pas l’air très causant, tes voisins. »

    Yaraëmon passe un doigt inquisiteur sur le marbre.

    « Tss. Tu pourrais nettoyer et faire les poussières, quand même. »

    Un geste circulaire et trois mots aux sonorités complexes et voilà qu’un petit courant d’air persistant fait voler les feuilles mortes. La fraicheur de décembre rappelle le demi-elfe à l’ordre aussi sort il de son sac sans fond un manteau épais qu’il enfile sans plus attendre. Il se laisse ensuite volontairement choir sur place pour se retrouver assis dans le vide.

    « Bah quoi, vilain ? Tu devrais le savoir que je déteste attendre debout. Et puis, tu pourrais être un plus sympa, non ? J’ai quand même délaissé un lit chaud et tendre pour venir me peler avec toi. Tiens, gouttes-moi ça. »

    Yaraëmon fait couler un peu de bière sur le marbre et s’en prend une grande gorgée. Il s’essuie la bouche d’un revers de manche puis reprends le contrôle de sa prestidigitation pour nettoyer la bière qu’il vient de verser.

    « Râles pas, je le fais pour toi. Svetna dit que ça attire les mouches et les moustiques. Ah bordel, les moustiques du Vinland, si tu savais… Quoi ? Oui, Svetna, d’accord. La belle blonde est toujours au fourneau. Mais laisses tomber, mon gars, je crois qu’elle en pince déjà pour quelqu’un. »

    Cela fait maintenant un bon moment que le demi-elfe est là, silencieux désormais. Les mains fourrés dans les poches de son manteau, Yaraëmon pousse de longues inspirations de dépit entrecoupées de tremblement de froid.

    « Qu’est-ce que ça pèle, ici. Ca serait si simple d’y remédier… Je me suis pas encore fait repérer et je vais quand même pas faire un dôme, murmure-t-il. Un dôme gris foncé en plus, bonjour la faute de goût. »

    La basse température de cette nuit de fin décembre s’est maintenant frayé un chemin jusqu’à ses os. La bière, aussi éternelle fut-elle, ne peut lui faire ignorer davantage qu’il est transi de froid.

    « Vi… vivement le printemps, hein ? Imagines un peu… Le début des floraisons, les journées redeviennent plus longues et… et… Quoi ? Qu’est-ce que tu veux que je te dise ? »

    Yaraëmon se mord les lèvres.

    « D’accord, si c’est ce que tu veux, reprend-il d’une voix amère. Asriel est mort. Voilà, t'es content ? Mais si, bien sûr que c’est ma faute s'il est mort. Sueta l’était aussi mais je suis intervenu à temps pour elle. »



    Le demi-elfe a un reniflement d’agacement.

    « Franchement, ce que je dis sur la guilde qui serait comme une famille... Si ca se trouve, c’est des conneries que je sers autant aux autres qu'à moi-même. Va savoir si c’est parce qu’il m’a régulièrement fait suer que j’ai traité Asriel avec négligence. Il était devant moi à dépérir, à cracher ses poumons et je me suis inquiété que de mon sort. J’ai merdé, Bergren, j’ai merdé. Je t’ai… Je l’ai laissé tomber… »

    

Yaraëmon s’enfonce les ongles dans ses paumes puis relève brusquement la tête.

    « Quoi, le destin ? Le destin n'est que la sauce que les idiots répandent à pleine louche sur leurs échecs pour masquer le fumet de leur incompétence. Voilà, c’est plus clair comme ça ? »



    Pas de réponse.

    Malgré sa nervosité, l’instinct de Yaraëmon lui fait prendre conscience d’un halo de lumière, une lanterne probablement. Le demi-elfe comprend que quelqu’un s’approche et juge qu’il est temps de partir. Il avise la travée de gauche qui fera l’affaire puis saisit une baguette qu’il fait tourner dans ses doigts pour préparer une incantation silencieuse. Un brin de laine tiré de son manteau se dématérialise tandis qu'il génère plus au sud une diversion sonore semblable à une nuée de rats. Il tourne les talons après un dernier regard.

    « Tu fais chier, Bergren. T’avais pas le droit de me laisser. »

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    Yaraëmon... aventurier Empty C’est un peu à cause de moi (2/2)

    Message par Bannor Lun 26 Déc - 23:02

    24 décembre

    Peu avant que le soir ne tombe, Yaraëmon franchit la grille du cimetière et salue son gardien drapé de noir, un barbu âgé au visage émacié.

    « Bonsoir, l’ami. Je viens rendre visite à un… un disparu de la guilde. Vous embêtez pas, je reste pas longtemps.
    - Encore vous ? Entrez donc. Que Kelemvor vous guide.
    - Euh… d’accord, merci. »

    Yaraëmon attend d’avoir dépassé l’épaule du prêtre pour laisser son visage exprimer sa surprise face aux mots du gardien. Quelques pas plus tard, il chasse d’un haussement d’épaules ses doutes sur la perspicacité potentielle du vieil homme puis se plante finalement devant la tombe du centaure.

    Les mains sur les hanches, il dodeline longuement de la tête puis lâche enfin : « Asriel est vivant. »

    Yaraëmon plisse les yeux en inclinant la tête de coté, comme pour mieux entendre son interlocuteur. Il fait ensuite les yeux ronds et agite un doigt menaçant.

    « Je serais toi, je ferais moins le malin. »
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    Yaraëmon... aventurier Empty Re: Yaraëmon... aventurier

    Message par Bannor Mer 1 Fév - 0:42

    25 décembre.
    C’est rassasié que chacun - fiancés, descendance, oncle et nièce - prend place pour trouver le confort nécessaire à prolonger la soirée après un diner parfait. Lové qui dans un canapé, qui dans un large fauteuil, cet auditoire restreint échange quelques regards interrogateurs tandis qu’il se prépare. De quel nouveau talent pourrait-il encore les régaler ?


    L’expert se distingue de l’amateur a l’attention qu’il porte au moindre détail de son art. Méticuleux, il enlève les dernières miettes sur la table pour y poser un coffret de cuir. Tout à son geste, il défait avec précaution les lanières de maintien de l’étui pour en sortir un violon, ce rare instrument aux courbes subtiles et à l’expressivité particulière. Il prend ensuite l’archet, son indispensable accessoire, dont il retend la mèche sans jamais poser les doigts sur les crins, crins qu’il graisse ensuite délicatement.

    Il regarde les personnes présentes et réalise qu’il se produit quelque chose. Le silence non seulement mais aussi la curiosité. Une curiosité exacerbée pour un secret, ou plutôt un jardin secret bien gardé.

    C’est un sentiment étrange qui le traverse, un sentiment quasi imperceptible pour son auditoire. Sa gorge se noue un instant puis il détend ses pensées et son pouls d’une discrète expiration nasale. Il s’offre même le luxe d’un rare et léger sourire à l’attention des personnes suspendues à ses gestes. Il soulève alors le violon dont il place l’extrémité basse sur sa clavicule gauche puis pose son visage sur la mentonnière. De l’autre main, il fait glisser l’archet sur les cordes pour en tirer successivement quatre notes vibrantes. L’un d’elle ne le satisfait pas aussi agit-il sur une des chevilles en bois pour modifier la tension de l’une des cordes. Après vérification probante, il se redresse pour adopter une posture neutre et s’apprêter à jouer.

    Il ferme les yeux en posant ses doigts sur les quatre cordes en boyaux sec et adresse de la main droite l’archet dans un ample mouvement. La première note est longue et douce, sans sursaut alors que l’archet glisse de la pointe au talon et inversement. La vibration résonne dans l’instrument et le son remplit la pièce jusqu’à faire frémir un verre vide en cristal. Tout à son art, il ne voit pas que les yeux de son public s’illuminent et qu’un sourire nait sur chaque visage.
    Il fait danser ensuite l’archet sur 2 cordes à la fois pour former différents accords qu’il alterne tout en modifiant la pression de ses doigts en différents endroits du manche. Si le mélange est déroutant aux premiers abords pour son auditoire, la répétition des notes dans un tempo faussement irrégulier produit l’émerveillement et la surprise. L’archet rebondit sur les cordes grâce aux mouvements subtils du poignet. L’on se surprend à respirer plus vite à mesure que la mélodie s’élance et à suspendre son souffle au son d’un tremolo poignant.

    Sous les doigts du virtuose, on partage alors sans vraiment pouvoir les nommer tant et plus d’émotions. La solitude, la joie, la peine, le mystère. Comme si une question faisait naître une réponse appelant elle-même une question plus troublante encore.

    Quand il délivre la note finale, vibrante et déliée à l’extrême, nul ne sait combien de temps à durer la représentation. L’on éprouve la surprenante fatigue d’avoir voyagé sans faire un pas, l’ébullition mentale d’un débat sans autre contradicteur que ses propres pensées. Le silence qui suit permet à chacun de reprendre une respiration mesurée, voir de passer un revers de main sur des yeux rougies par l’émotion ressentie.

    Sans un mot, l’artiste humble ne se gargarise pas des premiers bravos et applaudissement. Sans un mot, il remercie intérieurement son public de sa présence et son affection.

    Sans un mot et dans un geste discret, il touche du bout du doigt l’âme du violon, l’ultime pièce déposée par le luthier au coeur de l’instrument.

    Yaraëmon... aventurier Captur39
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    Yaraëmon... aventurier Empty Partout comme chez soi

    Message par Bannor Jeu 20 Avr - 1:11

    Yaraëmon se tient assis dans le noir et caresse songeur le drap de coton plié dans son sac. Le tissu est frais, la sensation est douce. Il laisse son esprit vagabonder. Un pli se dessine sur ses pattes d’oies.

    Le demi-elfe renifle en se rappelant la précarité de sa situation. Pas ce soir, murmure-t-il en enfonçant le drap dans le sac magique. Il se gratte au niveau de l’abdomen, d’autant plus accessible qu’un carreau d’arbalète a creuser deux jours plus tôt dans ses vêtements un sillon suffisant pour passer l’index. Yaraëmon tourne la tête vers la fenêtre puis se lève. Machinalement, il est tenté de passer l’anse de son sac sur le dossier de la chaise avant de se rendre compte qu’il n’y avait pas de véritable chaise. Tant pis, le sac atterrit sur la table. Puis il fouille dans une de ses poches secrètes et en sort une poignée de glands qu’il compte avant de les remettre à leur place sauf un.

    Mais quel chêne à pu produire pareil fruit, songe-t-il brièvement avec la conviction qu’il ne le saura jamais. Yaraëmon active ses zigomatiques, creuse ses joues, hausse ses pommettes, pince ses lèvres et étire sa bouche en un rictus forcé, le tout renouvelé deux fois.

    « Choisissons ces saucisses aux choux et sachons saisir ces anchois séchés. »

    Il répète la virelangue à plusieurs reprises puis, satisfait, lève le gland à hauteur de son visage et prononce :

    « Veðrfölnir. Niôhöggr. »

    Yaraëmon inspire en abaissant son diaphragme et visualise l’objet de ses pensées. La mine grave fait place à un large sourire puis il s’exprime d’un ton chaleureux.

    « Ma petite maman, n’ai pas peur, c’est moi, Yara. Toi seule peut m’entendre. Pardon de ne pas t’avoir donné des nouvelles plus tôt. Je suis à un moment de ma vie où je réalise ma chance et profite de l’occasion pour te dire mon amour. Je ne manque de rien, j’ai des amis fiables, pour ainsi dire presque une famille. J’ai troqué la valse incessante des oreillers contre des draps qui sentent la grâce et la fidélité. Je dois te laisser maintenant. Si jamais tu t’interroges, retiens ceci : je vais bien, ne t’en fais pas. »

    Le gland entre ses doigts devient poussière, une poussière qui s’évapore dans les volutes d’un vent divin. Yaraëmon déglutit. Il relâche les muscles de son visage fatigué d’avoir souri durant sa locution.

    Il se fait tard maintenant. Yaraëmon fait taire l’envie de reprendre la routine de ses soirées qui concluait invariablement à une beuverie à la taverne des soldats. À quoi bon maintenant ? Le demi-elfe récupère dans son sac une corne ouvragée. Il en défait le bouchon de liège et avale plusieurs gorgées de bière. Il s’essuie la bouche d’un revers de manche et lève la corne.

    « Prijatno, Svetna ! » lâche-t-il amer en versant de la bière par terre. Hélas, mille fois hélas, aucune réprimande n’y fait écho. Il approche sa joue contre la fenêtre mais non, il ne peut voir la guilde - sa guilde - de là où il se trouve. 
De dépit, il porte son regard sur la corne et se souvient. Voilà ce qui arrive quand on sollicite outre mesure sa mémoire. Il lui revient le souvenir d’un message rédigé peu de temps après son arrivée à la guilde, évoquant la vacuité de boire seul. Yaraëmon abonde à sa propre prose et referme la corne. Quelques mots accompagnent un vif mouvement de sa main et une force invisible et bariolée commence à nettoyer la bière au sol.

    Un peu plus tard, Yaraëmon partiellement dévêtu déploie sur le lit abandonné le drap de coton et s’allonge dessus. Il pourrait combattre le froid en plaçant contre son palais une douceur bleue mais non, mieux vaut préserver ses ressources. Il se couvre alors avec une gabardine épaisse, odorante et feuillu.



    « Être partout comme chez soi, vieille branche ».

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